- Walter Benjamin, Petite histoire de la photographie, traduit
de l’allemand par Lionel Duvoy, Allia, 2014
- Leslie Kaplan, Mai 68, le chaos peut être un chantier, POL, 2018
- Jean A. Keim, Icônes russes, Fernad Hazan, 1967
- Jean-Loup Trassard, Images de la terre russe, Le temps qu’il
fait, 1990
- Rainer-Maria Rilke et Lou Andréas-Salomé, Correspondance,
traduction de Pierre Klossowski, Le Nouveau Commerce, 1976, 1989.
- Eric Chevillard, Ronce-Rose, Minuit, 2017
- Denis Roche, La photographie est interminable, entretien
avec Gilles Mora, Seuil, 2007
- Vincent Almendros, Un été, Minuit, 2015
1-
Une autre
bibliothèque, repérages, y saisir l’occasion.
2- Très beau et
apéritif petit livre de Benjamin, avec une belle iconographie,, auquel on sait
d’emblée que l’on reviendra, parce qu’il ouvre des perspectives, par l’approche
technique (voir aussi L’œuvre d’art à l’époque de sa reproductibilité
technique – le rapport à l’aura). Dans cette richesse, des éléments un peu
flottants, que j’ai du mal à saisir, ou du moins d’en faire des points de
repère définitif, même s’il éclaire – jeu de lumière. Le procédé, le portrait
et son usage, la volonté d’y faire « art », dans le cliché (ou du moins
à ce qu’il renvoie), le portrait anonyme (August Sander), les superbes pages
sur Eugène Atget (« L’extraction de l’objet hors de son enveloppe, la
destruction de son aura, constitue la marque d’une perception dont le sens pour
ce qui est semblable dans le monde s’est accru au point que, par la
reproduction, elle annexe aussi l’unique. » - 42), l’idée de
« création collective », de miniaturisation (« l’art comme photographie
– 49), le questionnement incessant des origines techniques, ce qui s’y dépose.
3-
« En dépit
de toute l’habileté artistique du photographe et toute la rigueur avec laquelle
le modèle maintient la pose, l’observateur, en contemplant une telle image, se
sent irrésistiblement conduit à y déceler, hic et nunc, la plus petite
étincelle de hasard par laquelle la réalité a en quelque sorte brûlé le sujet
photographié, à trouver le lieu invisible où, dans l’instant de cette minute
depuis longtemps écoulée, l’avenir se niche aujourd’hui et avec tant
d’éloquence que nous pouvons, rétrospectivement, le dévoiler. » (16-17)
4- Je n’avais
jamais lu Leslie Kaplan, qui évoque mai 68 dans ce qui tient de l’essai,
dynamique, sans nostalgie, mais sur ce qui reste actuel de ce mouvement, et
d’un texte dialogué, quasi-théâtral, ce qui n’étonnera pas puisque la prise de
parole en est le fondement (« qu’est-ce que c’est parler ? parler
vraiment / parler à quelqu’un / un dialogue c’est quoi » - 10). Ce seront
les développements sur le dialogue (34-41), qui ne propose pas vraiment de
réponse, mais un ensemble de propositions qui montre l’importance d’une parole
ouverte, attentive, questionnant, nouvelle perpétuellement. La reprise de
slogans, devenus lieux communs, vidés de leur sens, pose dès lors un problème
(je songe, par rebonds, à cette distinction entre le style direct et indirect
de Deleuze – via Hocquard, pour la source) : « les paroles vivantes
ont été ’récupérées’, c'est-à-dire : sont devenues des clichés / c’est
l’état de maintenant / et c’est là-dessus que nous travaillons » (48).
Comme dans le livre de Jean6christophe Bailly, on trouve cette préoccupation de
l’actuel – et ici, une préoccupation forte et capitale du politique, par
l’usage de la parole.
5-
Tout petit
livre d’introduction, miniature, texte & images, dont je retiens « le
temps et la négligence des hommes ont parfait ces destructions » (ce qui
reste des icônes) et Le prophète Elie (Ecole de Novgorod, vers une abstraction
– & le fond rouge), ainsi que les reproductions de Théophane le Grec et d’André
Roublev (la finesse, la grâce).
6-
Images de la
terre russe, dont j’aime les très belles photographies (particulièrement les
routes qui font échos chez moi à une scène d’Andreï Roublev de Tarkovski – les lignes
dans le champ, lors de la fonte la cloche). Le texte ne me touche pas (sauf parfois
les listes entre tirets, sans ponctuation : « – blancs couleurs rires à
fichus – », 27)
7-
A l’extérieur
aussi, de cette correspondance, pourtant pas nécessairement anecdotique, avec
ce qu’elle touche dans le processus créatif.
8- Une affaire de
circonstances, comme souvent, dans ce qui fait écho, atteint une cible, et ce
qui ne fait à première vue pas jouer la machine à lire, mais émergera peut-être
plus tard, liens, reports, jonctions.
9- Il faut
toujours avoir un Chevillard en réserve – bien que celui-ci me semble une
petite errance, un peu à côté (je pense au premier, dans le côté un peu
enfantin, quelque chose de Zazie qui aurait vieilli – le déguisement, le
cordonnier – mais ça n’a pas pris).
10- Denis Roche photographe, que je découvre un
peu – on connaît sans avoir vraiment regardé -, que j’approfondis. La magie du
livre d’images, des préoccupations qui se font jour, et puis ce qui fait
système – construction, bricolage et une part de ce qui fait le hasard
construit de la photographie – conditions de lumière : « Ces
photos sont prises parce que nous sommes à un endroit donné, à un moment donné.
[…] Mon ‘endroit’, c’est celui où je suis, où je me trouve, où je me tiens. Ce
n’est pas un ‘lieu’. Quand je prends une photo, quelle qu’elle soit, où que ça
se passe, c’est dans un endroit précis. » (51) et « le jeu excitant
du hasard » (65). Sur le rêve, le monde flottant (77), la mort, le masque,
l’ex-voto, le manque (20 & 28), une idée qui se construit et bouge, selon
les éclairages symboliques ou conceptuels, en ouvrant le champ.
11- Vincent Almendros, comme un polar du soir,
très bien écrit – et quand même, interroger ce qui fait un peu la marque de l’éditeur,
une écriture comme lieu commun – du coup : un livre-vite, plaisir aussi,
mais qui ne tient pas la mémoire.
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