"La poésie, c'est de constater que beaucoup de ce qui est signification dans la parole ordinaire est empiégé par sa formulation conceptuelle, laquelle implique l'oubli du temps vécu et du caractère absolu des situations de hasard que toute personne a à vivre. Et d'entrée de jeu elle cherche donc à transgresser cette sorte de signifiance, s'ouvrant pour ce faire à des notations qui montrent des profondeurs de la personne: ce qui est vivre l'écriture comme une poussée du dedans aussi continuelle qu'irrésistible, et assure au tour qu'elle prend dans le poème quelque chose d'irréductiblement singulier, encore qu'à être telle elle n'en sera que plus riche d'universel."
Yves Bonnefoy, Ce qui alarma Paul Celan, Galilée, 2007 - 21
"[...] Stéphane Mallarmé s'étonne que Descartes n'ait pas été compris, hormis par les mathématiciens, et il marque sa volonté d'interroger l’œuvre. Ce qui suit, certes, prend pour seul espace de réflexion le langage, Mais Mallarmé songe à Descartes en notant: "Toute méthode est une fiction, et bonne pour la démonstration", et, tout à la suite: "Enfin la fiction lui semble être le procédé même de l'esprit humain - celle qui met en jeu toute méthode, et l'homme est réduit à la volonté". Il lie cette phrase à la mention "Page du discours de la Méthode..." (1). Le mot "fiction" ne désigne pas seulement des conflits de langage illustrés par la création de personnages; il qualifie l'acte de conscience qui permet à l'esprit de se distinguer des images qu'il produit. En ce sens doit être entendue l'insistance de Mallarmé à dire qu'on ne peut créer, et qu'on ajoute pas au monde. Toute pensée est une fiction."
Jean Roudaut, Un Mardi rue de Rome, Notes sur un livre en paroles,
William Blake and Co. - 32-33
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1- Stéphane Mallarmé, "Notes sur le langage", Œuvres complètes, t. I, p. 504.
William Blake and Co. - 32-33
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1- Stéphane Mallarmé, "Notes sur le langage", Œuvres complètes, t. I, p. 504.