mercredi 17 octobre 2018

Livres lus ou relus (terminés entre le 7 et le 13/9)


- Chamfort, Maximes et anecdotes, préface d’Albert Camus, Noé, 1963
- Kadhem Khanjar, Marchand de sang, Plaine page, 2017

1- « Qu’est-ce que la maxime en effet ? On peut dire en simplifiant que c’est une équation où les signes du premier terme se retrouvent exactement dans le second, mais avec un ordre différent. C’est pour cela que la maxime idéale est retournée. Toute sa vérité est en elle-même et pas plus que la formule algébrique, elle n’a de correspondant dans l’expérience. On peut en faire ce que l’on veut jusqu’à épuisement des combinaisons possibles entre les termes donnés dans l’énoncé, que ces termes soient amour, haine, intérêt ou pitié, liberté ou justice. On peut même, et toujours comme en algèbre, tirer de l’une de ces combinaisons un pressentiment à l’égard de l’expérience, mais rien de tout cela n’est réel parce que tout y est général. », nous dit Albert Camus (7), avant d’expliquer que l’intérêt de Chamfort est qu’il n’écrit pas de maximes.
2- « Le paresseux s’accommode d’une maxime qui le dispense de faire lui-même les observations qui ont mené l’auteur de la maxime au résultat dont il fait part au lecteur. », répondrait Chamfort (237), qui ferait donc de son recueil / livre, un livre d’expérience – celle du monde et du Monde – et qui mène, à mon sens, à l’aspect plus intéressant des dernières parties.
3- Difficulté avec la forme de la maxime, le côté bon mot, l’anecdote qui brille. Pourtant je lis (en écho, un livre sur la forme brève, lu il y a quelques années – mais impossible de me souvenir quoi – le bout de la langue). Une lassitude dans la répétition, le caractère souvent interchangeable des points, et parfois une pépite, qui passe souvent aussitôt allumée. « Je n’étudie que ce qui me plaît ; je n’occupe mon esprit que des idées qui m’intéressent. Elles seront utiles ou inutiles, soit à moi, soit aux autres ; le temps amènera ou n’amènera pas les circonstances qui me feront faire de mes acquisitions un emploi profitable. Dans tous les cas, j’aurai eu l’avantage inestimable de ne pas me contrarier, et d’avoir obéi à ma pensée et à mon caractère. » (324) Je souligne circonstances.
4- Deux modes de lecture du livre de Kadhem Khanjar : pour moi, et pour le travail (choisir des textes pour mes élèves). Le va-et-vient.
5- Beau livre, dont les multiples photographies donnent à voir le texte dans son caractère performé, et c’était à mon sens capital qu’il soit ainsi documenté. Ce qui fait l’importance de cette poésie, c’est sa précarité, qui va de pair avec celle de la vie dans l’Irak actuelle. C’est ici un geste fort, et pour avoir vu Kadhem Khanjar en lecture/performance (on peut jeter un œil ici, sur tapin2, et ) il y a  presque deux ans, je comprends cette nécessité de donner corps, spectaculairement, certes, mais aussi humainement au texte (il est étonnant, et c’est une question qui lui avait été posée, de voir comment l’auteur habite son texte, son témoignage, son rôle de poète, avec aussi un détachement par l’humour, la belle humeur – précarité de la vie, mais dans son caractère tragique autant que comique). Un texte dur, où l’anaphore fait sens, dans la répétition des morts, des attentats. Un livre fort.

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